Markus Vogt est un théologien catholique qui tient la chaire d’éthique sociale à l’université Louis-Maximilien de Münich et travaille aussi au Centre munichois Rachel Carson pour l’Environnement et la société. Il est aussi membre du groupe de travail de la conférence des évêques catholiques allemands.
Dans un texte récent (juin 2012), il propose une réflexion sur la notion de « durabilité », utilisée à outrance désormais pour répondre aux enjeux de la crise écologique contemporaine depuis la Conférence de Rio en 1992. Il rappelle pourtant que dès 1713, l’économiste allemand Hans-Carl von Carlowitz introduisait la notion équivalente de « Nachhaltigkeit », dans le cadre d’une réflexion sur la gestion des biens forestiers pour les générations futures.
Un rappel pour souligner que désormais, dans le cadre de l’économie contemporaine, ce n’est pas le progrès pour lui-même qui importe mais le maintien des grands équilibres économiques, sociaux et écologiques qui assure la pérennité et la justice sociale. Pour cela, la capacité à se restreindre volontairement est au cœur du processus, loin des faux-semblants du green-washing qui ne fait qu’entretenir la course en avant de la consommation. Assumer la question de pratiques durables, qui préparent l’avenir, oblige forcément à de nouvelles connexions, à un autre rapport au temps et à une attention commune au local et au global.
Pour les Eglises, l’enjeu est de construire des passerelles entre des pratiques durables et une bonne gérance de la Création. De la même manière que l’idée chrétienne de charité était entendue exclusivement comme une vertu et a mis du temps à devenir le moteur de politiques de solidarités, de même la foi en la Création attend une traduction de ce genre pour devenir politiquement acceptable et engendrant la justice. L’idée de Création sans celle de durabilité la rend éthiquement aveugle. La durabilité sans la foi en un Créateur risque de mener à une éthique superficielle et triviale. C’est donc le besoin d’une extension des principes sociaux chrétiens qui s’avère urgente. A côté des piliers du respect des personnes, de la subsidiarité et de la solidarité, la durabilité de nos choix devrait devenir le quatrième pilier de l’éthique sociale chrétienne. Il est devenu en effet un impératif catégorique de notre responsabilité moderne vis à vis de la Création. Plus que des modèles d’équilibres écopolitiques, c’est cette culture renouvelée de la vie qui est à faire émerger d’urgence.
Source : Ecojésuites
100 x d’accord :
Quand au début de l’ère « moderne », les hommes ont réalisé que la planète était ronde, ils ont pu commencer à élargir leur conscience à la dimension planétaire. Ce fut un processus lent mais lorsqu’en juillet 1969 (hier !), ils ont vu la terre depuis la lune, la preuve était faite que la terre n’était plus « plate ». Reste à ce que les actes suivent : l’éthique sociale chrétienne doit intégrer cette responsabilité à l’égard du prochain-proche mais aussi à l’égard du prochain-lointain. Surtout depuis que l’on sait que notre type de développement repose sur le « non-développement » de tant de populations maintenues à l’écart.