Aux Philippines, un prêtre reçoit le prix « Nobel vert »

La persévérance paye. Le P. EdwiN Gariguez a pu l’expérimenter après avoir mené un jeûne de 11 jours pour forcer le gouvernement philippin à suspendre le projet minier géant (près de 11 000 ha) envisagé par le géant norvégien Intex dans la grand île de Mindoro (exploitation de Nickel).

Le projet minier est situé près de deux hotspot de biodiversité et de 4 fleuves irriguant communautés et champs de riz. L’utilisation d’extraction à l’acide envisagée aurait mené à la production de millions de tonnes de déchets toxiques. Sans parler des terres ancestrales qui seraient menacées. Tout cela n’avait pas empêché, du fait de la corruption ambiante, les autorités philippines de donner un permis d’exploitation. « Father Edu » a fondé en réaction à ces menaces l’Alliance contre l’exploitation minière (Alamin) regroupant les résidents de Mindoro, des autorités locales, des militants associatifs, des dirigeants religieux et des membres des tribus indigènes. Il ne s’agit pas de s’opposer à l’exploitation en tant que tel mais de prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger l’environnement, les droits des communautés locales et d’assurer une répartition équitable des bénéfices d’une telle exploitation. Une position modérée qui n’a pas empêché des oppositions très dures, jusqu’à l’exécution sommaire d’un membre d’Alamin. Malgré le moratoire imposé par le gouvernement local, Intex est passé en force en continuant l’exploitation minière. Father Edu est parti du coup en Norvège pour s’adresser aux parlementaires norvégiens et aux actionnaires d’Intex. En 2009, il entreprend un jeûne de 11 jours jusqu’à ce que finalement le Département de l’Environnement et des ressources naturelles (DENR) conclue un accord pour mener des enquêtes concernant les violations des droits des populations et de l’environnement. De nombreux investisseurs étrangers ont, du coup, quitté le navire (dont Goldman Sachs !), mettant en péril le projet.

Pour ce fait d’arme, il a obtenu le prix Goldman pour la protection de l’environnemental.Après avoir travaillé dans la mission Mangyan, à Mindoro, il a été nommé en 2010 comme secrétaire exécutif du Secrétariat national pour la justice sociale et la paix de la conférence des évêques des Philippines.

« La protection des droits des pauvres devrait prévaloir sur la cupidité des entreprises. Un développement intelligent doit prioriser les besoins pour assurer la permanence écologique sur le profit des marchés. Nous ne devons jamais sacrifier les gens et leur environnement pour le bénéfice à court-terme de quelques uns. »

Gariguez est l’une des six personnes récompensées cette année, toutes engagées, en Argentine, en Chine, au Kenya, en Russie, aux Etats-Unis, pour la protection de l’environnement et des communautés locales. Ikal Angelei, Kenya (lutte contre le barrage géant Gibe 3, près du lac Turkana) ; Ma Jun, Chine (travaille avec les entreprises pour améliorer leurs pratiques environnementales) ; Evgenia Chirikova, Russie (milite contre le projet d’autoroute qui traverserait le forêt Khimki, le poumon vert de Moscou) ; Caroline Cannon, USA (lutte avec la communauté Inupiat pour préserver l’eau potable contre les menaces liées aux exploitations offshore de pétrole et de gaz) ; Sofia Gatica, Argentine (lutte contre l’usage de produits chimiques dispersés dans les terres locales, empoisonnat les populations)