Vers 1202, quelques moines viennent s’installer sur la colline d’Aë, au sein du bocage normand. Le lieu va devenir un « Mons Dei » et désormais « Mondaye », et va faire naître une communauté de Prémontrés toujours présents et accueillants. Et désormais faisant leur retour à la terre.
En effet, depuis octobre 2017, le communauté a décidé de devenir autosuffisante en légumes, réexploitant les 1500 m2 de potager à sa disposition.
Suite à une réflexion communautaire, menée grâce à la dernière visite canonique, nous avons pensé qu’il serait bon que nous ayons un lieu de travail commun où les frères puissent produire ensemble, quelque chose d’utile à l’abbaye. Sensibles à l’appel du Pape François au sujet du respect de la création, nous avons voulu que ce projet soit durable et puisse engendrer une conversion plus globale de notre vie commune quant à notre empreinte écologique. Nous avons donc décidé de créer un potager conduit en bio, avec l’objectif audacieux de parvenir, à terme, à l’autosuffisance en légumes pour la communauté et l’hôtellerie.
Avec l’aide précieuse de la chambre d’agriculture, nous avons évalué qu’une surface de 1500m² devrait nous permettre de parvenir à notre but (180m² sous serre et le reste en plein champ). Pour l’ensemble de notre production, nous avons opté pour la technique de maraîchage sur sol vivant. C’est-à-dire que nous travaillons sur des planches fixes (buttes de terre de 80cm de large sur 15 à 20m le long) séparées par des passe-pieds (petits chemins) de 40cm de large. L’esprit est de travailler en bonne intelligence avec la création ; l’ensemble du système repose sur la lutte biologique présente dans la nature (l’utilisation de toute molécule de synthèse y est donc absolument proscrite).
Pour cela, nous cherchons à prendre soin de l’ensemble des composantes du milieu naturel. À titre d’exemple, pour favoriser la vie souterraine (vie microbienne, vers de terre, insectes…) nous ne travaillons pas le sol. Pour lutter contre l’enherbement (principale difficulté dans ce type de système) nous maintenons constamment la terre recouverte d’un paillage (paille, foin, déchets de tonte, feuilles mortes…). En ce qui concerne les insectes, nous cherchons à développer une large biodiversité (de faune et de flore) de sorte à obtenir une population abondante et variée. Une telle diversité permet la mise en place d’une concurrence naturelle des espèces qui induit un équilibre et limite la prolifération des ravageurs. Nous voulons aussi développer les associations de cultures : certaines plantes ont un pouvoir répulsif sur certains insectes, le poireau par exemple est répulsif pour le principal ravageur de la carotte et inversement, il est donc intéressant de les cultiver simultanément en rang alternés. Aussi, la création d’une marre favorise l’installation de grenouilles qui sont des prédateurs naturels des limaces. L’installation d’abris pour hérissons a le même effet. Toutefois, comme dans beaucoup de domaines, l’expérience reste le meilleur moyen d’apprentissage. Nous allons donc devoir expérimenter et apprendre de nos réussites et de nos erreurs !
Plus largement, la production saisonnée va devoir nous apprendre à repenser notre consommation alimentaire. En effet : que faire d’une production concentrée sur quelques mois alors que nous avons l’habitude d’être livré chaque semaine de la quantité commandée ? Ceci nous confronte à de nouvelles problématiques intéressantes et stimulantes avec de nombreux projets nouveaux qui émergent : devrons-nous avoir un mini atelier de conserverie, des chambres froides, renoncer à certains légumes, avoir quelques animaux : des poules, des abeilles… Bref, nous ne nous le cachons pas, nous partons tous un peu à l’aventure avec ce potager. Cependant, l’objectif premier d’avoir un projet productif et fédérateur pour la communauté semble déjà bien être atteint !
Bravo
Michel