POLITIQUE – Avec Bannon, la Chartreuse a un arrière-goût de renfermé

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Capture d’écran 2019-04-26 à 12.19.16E&E a déjà évoqué la mobilisation de certains milieux conservateurs contre l’écologie intégrale du pape François. Un article récent du journal La Croix raconte ainsi comment Steve Bannon, ancien conseiller du président Trump milite activement contre les prises de position du pape argentin.

Steve Bannon, l’ancien rédacteur en chef du site ultra-conservateur Breitbart News se fait fort de rassembler en Europe les groupuscules conservateurs les plus opposés aux ouvertures du pape François. Ce qui est reproché au pape actuel ? Ses appels à l’accueil des migrants, son dialogue inter-religieux, sa position de responsable engagé sur les défis climatiques et écologiques etc.Tout ce que disaient aussi ses prédécesseurs, mais d’eux on aura retenu surtout pour Jean Paul II son anti-communisme frontal et pour Benoît XVI certains propos critiques sur les prétentions de l’islam.

Bannon est désormais installé en partie en Italie où il tente de fédérer les milieux nationalistes du pays et d’Europe. Avec un lieu qui veut être la citadelle de cette opposition politique : la chartreuse de Trisulti, un ancien monastère au sur-est de Rome, où il projette d’ouvrir dès l’été une « académie pour la défense de l’occident judéo-chrétien » , voulant accueillir chaque année près de 300 étudiants venus d’un peu partout. Souverainistes contre populistes, voilà donc le combat que veut alimenter ce lieu, havre historique de silence et de retrait du monde, où les anciens moines du lieu doivent se retourner dans leur caveau.

Si on veut mieux comprendre pourquoi, dans certains milieux chrétiens, on revendique être des climato-sceptiques notoires, il suffit d’avoir saisi le lien avec cette nouvelle approche politique : les milieux conservateurs (dans leur engagement politique, économique et religieux) mènent, avec de riches mécènes, un prétendu combat civilisationnel où tout est bon pour dénoncer leurs opposants écologistes, militants, etc. Il s’agit bien de vieux rêves de restauration de la chrétienté qui se fomentent dans ces réseaux, à l’opposé d’une approche ecclésiale conciliaire qui a voulu faire sortir l’Eglise de ces lieux qui sentent bon le renfermé.

Comme l’explique Constance Vilanova dans son article, c’est un peu comme si l’expérience de renouveau pastoral durant la deuxième moitié du XXe siècle qu’avaient faites de nombreuses communautés chrétiennes d’Amérique du Sud s’affrontait directement à un christianisme nord-américain, aux relents nationalistes, intégristes et suprémacistes, caché derrière des luttes bioéthiques (anti-avortement, pro-famille) pour imposer un agenda politiquement très marqué (lutte contre l’islam, défense d’une civilisation judéo-chrétienne…)

La future académie est créée en étroite collaboration avec le Dignitatis Humanae Institute, ONG présidée par le cardinal américain Raymond Burke, un allié idéologique de taille, l’un des chefs de file des anti-François. Depuis le début du pontificat, ce cardinal américain a publiquement et durement critiqué le pape à plusieurs reprises.Il y a quelques mois, le cardinal Burke témoignait à l’agence Reuters de son impatience de travailler avec Harnwell et Bannon « pour promouvoir un certain nombre de projets qui devraient apporter une contribution décisive à la défense de ce que l’on appelait la chrétienté ».« Cette alliance Bannon Burke n’est pas surprenante, elle est même évidente. Mais elle demeure choquante », estime l’historien et théologien italien Massimo Faggioli, depuis Philadelphie où il enseigne. « Elle révèle l’empreinte en Europe d’un mouvement identitaire catholique, nationaliste anti-islam à l’opposé des positions du pape. C’est un mouvement minoritaire mais inédit », explique-t-il.Selon cet expert, le Vatican avait développé, ces quarante dernières années, une relation spéciale avec les États-Unis, rompue depuis 2013 avec le pontificat de François. « Jean-Paul II avec l’anti communisme, Benoit XVI avec sa condamnation d’un islam radical : ce lien Vatican États-Unis était devenu coutumier. François est un Sud-Américain qui ne confère pas aux États-Unis une place aussi privilégiée que ses prédécesseurs », avance Massimo Faggioli qui insiste : « Au contraire même, il observe d’un mauvais œil ses aspirations d’empire. Si François ouvre ses bras à l’Amérique, c’est à celle du Sud ». La croisade anti pape François de Steve Bannon et le réseau qu’il se constitue avec Marine Le Pen, Matteo Salvini et Viktor Orbán « marquent la fin du mouvement néoconservateur des années 1990, libéral, porté par une faction évangélique et catholique aux États-Unis. C’est un néopopulisme catholique fermé et inquiétant », estime encore Massimo Faggioli, qui reprend : « Si le mouvement lancé par Bannon est minoritaire, il bénéficie de dons de personnes fortunées issues de l’élite catholique américaine, il est diffusé par d’importantes figures médiatiques et très bien organisé sur les réseaux sociaux. Trois avantages que la frange catholique plus libérale et progressiste n’a pas forcément ».

Source : Art Constance Vilanova,

 

 

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