RENCONTRES – Cet été, l’écologie intégrale fait recette

Deux rencontres importantes (au moins) se déroulent actuellement autour des enjeux de l’écologie intégrale.

La première, déjà évoquée ici est la première université d’été de l’écologie intégrale qui démarre ce lundi soir et jusqu’à vendredi, à Dourdan, au sud de Paris.

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Le journal La Croix donne la parole à deux des organisateurs de ce rendez-vous, Martin Choutet et Louise Roblin. En voici un extrait :

À travers « l’écologie intégrale », certains dénoncent une appropriation de l’écologie par des courants néoconservateurs. Que répondez-vous ?

M.C : Il est dommage que certains s’en tiennent aux préjugés plutôt que d’engager le dialogue sur des enjeux aussi fondamentaux. Ce qui me semble décisif, c’est d’aborder ces questions de manière globale. On ne peut séparer nature végétale, animale, humaine, spirituelle. Tout est lié.Les rapports au monde et aux autres ne sont pas purement techniques. Dans cette perspective, il faut avant tout un débat, des échanges. Cette université a pour but de permettre aux personnes de se former, de comprendre, de prendre conscience de l’impact de leurs comportements, quelles que soient leurs convictions personnelles.

Qu’attendez-vous de cette université d’été ?

M. C : Qu’elle incite les participants à se mobiliser, à mettre en place des actions concrètes, de façon plus radicale. Il faut arrêter de croire à la vision libérale selon laquelle tout va rentrer dans l’ordre. Les choses changeront si les gens s’impliquent. Chacun doit être mis face à ses responsabilités dans son domaine : politique, associatif, social, médiatique…Il n’y a pas un chemin unique. Il faut être capable de s’organiser à plusieurs, comme pour le plan Marshall.

L’autre rencontre se déroule à Annecy et est organisée par le Service national de la mission universelle de l’Église (SNMUE) du 19 au 23 août 2019. Cette université d’été a pour thème « Le cri de la Terre est aussi le cri des pauvres ! ». Extrait d’une présentation par le P. Antoine Sondag, directeur de ce service

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L’encyclique Laudato Si’, publiée en juin 2015, a-t-elle déterminante dans l’organisation de cette université d’été ?

P. A. S. : Beaucoup de gens se sont saisis de Laudato Si’. Actuellement il y a une phase d’appropriation de ce texte dans l’Église de France, qui, peu à peu, rentre dans les esprits, mentalités, structures. C’est une encyclique fondatrice d’une nouvelle génération de chrétiens, souvent militants qui ont à cœur de la mettre en application. Cette université d’été est destinée à favoriser la formation permanente des agents pastoraux ou de gens actifs dans l’Église. (…)

Y a-t-il un bouleversement au sein de l’Église sur l’écologie ?

P. A. S. : Les catholiques en France ne sont pas différents du reste de la société. Il y a une prise de conscience progressive de ces thèmes qu’on pourrait appeler écologiques. C’est l’idée de contribuer à la création d’un modèle économique différent du nôtre : qui consomme moins d’énergie, de CO2, qui soit plus respectueux des ressources naturelles. Les catholiques de France comme les autres, se rendent bien compte que ce sont des questions de fond posées par notre société. L’encyclique a été une aide parce qu’à la fois elle favorise la prise de conscience en mettant des mots sur ce qu’on pressent, ou qu’on aimerait nommer, et en même temps elle aide à mobiliser les catholiques et les ressources spirituelles pour favoriser cette mutation

Qu’est-ce qui vous touche personnellement dans le thème de cette année ?

P. A. S. : Je suis un homme de ma génération. De même que Laudato Si’, l’encyclique Populorum Progressio de 1967 fut le symbole d’une génération de catholiques qu’on appelait à l’époque « tiers-mondiste », qui regardaient par-delà les frontières de leur propre pays, qui se préoccupaient de l’avenir de l’humanité et de la planète. Cette génération tiers-mondiste dont on peut sourire aujourd’hui car elle a des cheveux blancs, est devenue génération Laudato Si. Elle se préoccupe à nouveau du bien commun.Je crois qu’il y a vraiment un changement dans l’Église et il faut surfer sur cette vague de préoccupation écologique pour que les chrétiens y trouvent leur place. Il ne faut pas traiter les préoccupations écologiques et sociales, l’une au détriment de l’autre, ni les opposer à plus forte raison. La préoccupation sociale traverse toutes les activités de l’Église.

Et puis, ce n’est pas tout. En Suisse, à Saint-Maurice, du 18 au 21 août, le colloque du réseau des théologiens moralistes ATEM se réunit sur le thème  » Croissance-décroissance, quel imaginaire pour la pensée économique ? »Capture d’écran 2019-08-19 à 18.55.00.png

L’approche ici est plus économique. L’argumentaire de ce colloque est intéressant à découvrir, interrogeant l’imaginaire quasi indéboulonable, même chez des chrétiens d’une croissance économique, comme préalable à toute discussion. Et si, ici aussi, la posture relevait davantage d’une posture relevant de la philosophie (platonicienne) que de l’espérance et la dynamique chrétienne ? Nul doute que l’ami Martin Kopp qui a fait sa thèse sur le sujet sera actif pour secouer les méninges des théologiens sur place.

Le colloque sera consacré à l’économie mais avec une position de recul afin de penser l’imaginaire qui sous-tend les échanges et les régulations que nous menons dans le monde et par lesquels nous impactons ce monde jusqu’à le menacer de destruction. Nous connaissons cette menace et nous savons aussi que si nous n’agissons pas, ni Dieu ni la nature ne compenseront nos actes. Or nous n’agissons pas ou guère. Pourquoi le savoir ne suffit-il pas à mobiliser l’action ? Sans doute parce que nous sommes prisonniers d’une vision sociale partagée qui nous pousse à aller toujours plus loin et toujours plus haut. Or cet imaginaire est au fondement de l’économie. La nécessité d’une croissance nous apparaît même comme une contrainte fonctionnelle, préalable à toute critique, éthique ou théologique, sur l’économie. Or si c’était là, précisément ce que la théologie chrétienne devrait questionner ? Ne s’agirait-il pas là de la transposition sécularisée d’une quête d’infini plus platonicienne que chrétienne ? Ne devrait-on pas alors opposer à l’imaginaire de l’économie un autre imaginaire pour penser la linéarité de l’histoire en fonction de sa fin et non de son début ? Quels effets transformateurs sur la vie humaine et les pratiques sociales peuvent avoir les éléments constructeurs que sont, au cœur de la foi, par exemple la résurrection ou l’eucharistie ? Comment, à partir de là pourrait-on penser l’économie et l’évolution de nos sociétés, dans une vision qui ne nie ni la mort ni la finitude, mais qui appelle dans l’espérance à une autre lecture de la réalité ?

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