SOLAIRE – Et la lumière fut

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Un article récent d’E&E évoquait un texte publié dans la revue diocésaine de Besançon, assez critique envers la présence de panneaux solaires sur le toit des églises. Mais ce point de vue n’est pas le seul dans le diocèse. Il l’est d’autant moins que l’élan de l’encyclique Laudato si appelle à dépasser ces peurs assez classiques d’un certain nombre de gestionnaires.

Extraits d’une lettre ouverte à l’évêque du lieu, écrite par un acteur local de l’écologie chrétienne dans le diocèse.

Lettre ouverte à mon évêque (…) Dans le dernier numéro d’Eglise de Besançon, deux acteurs diocésains cosignent un long article au nom du CDAS où ils expliquent que leur «mission », c’est le mot qu’ils emploient, est  » d’éviter tout cela», c’est à dire l’installation de panneaux photovoltaïques qui, à leurs yeux, est «un effet de mode temporaire qui pourrait dénaturer ces édifices sacrés». Ils appuient leur avis sur une série d’arguments réglementaires ou techniques ( pollution à la fabrication des panneaux, quasi impossibilité de recyclage, durée de vie limitée, fabrication presque exclusivement chinoise etc,), un argumentaire tellement à charge qu’on peut s’interroger sur son objectivité . C’est pourquoi je joins à cette lettre une analyse de Greenpeace qui répond en grande partie aux doutes et aux affirmations de l’article d’Église de Besançon. Cela vous permettra, cher Père évêque, de vous faire une idée plus équilibrée. (…) Est-il bien judicieux d’invoquer, en 2022, la loi de janvier 1907 stipulant que «le toit de l’église fait partie de l’affectation au culte catholique», pour refuser la présence de panneaux photovoltaïques. (…) J’imagine un village dont l’église est rarement ouverte aux célébrations, qui doit malgré tout entretenir le bâtiment et qui demande la permission d’installer des panneaux photovoltaïques pour réduire les frais énergétiques de la commune, tout en participant à la lutte contre le réchauffement climatique. L’Église diocésaine, notre Eglise va-t-elle dire :  » Non, nous ne voulons pas vous aider, nous voulons conserver intact notre patrimoine séculaire . Vos préoccupations ne sont pas les nôtres »? N’y a-t-il pas là de quoi réveiller un anticléricalisme justifié ? Mais surtout,comment prétendre être une Église ouverte sur le monde, à ses souffrances, ses inquiétudes, ses espérances comme on le répète dans nos Prières Universelles si nous refusons de traduire nos paroles en actes, comme le dit St Jacques? Pour moi, j’aurai du mal à confesser mon appartenance à l’Eglise du Christ si, dans un village, on me dit que «Monsieur le curé a refusé de prêter ses clés » pour participer à un projet communal d’économie d’énergie, J’essaierai de me rassurer en pensant qu’ailleurs en France, d’autres diocèses se montrent moins préoccupés du toit de leurs églises que de l’avenir de notre «Maison commune». Dommage, cher Père évêque, j’étais si fier que mon diocèse ait été, grâce à vous, l’un des premiers à mettre en œuvre «Laudato si » ! Fraternellement

Occasion de faire un point sur les questions techniques évoquées. Voici ce qu’en dit l’analyse de l’ONG Greenpeace

Fabriquer des cellules photovoltaïques, ça pollue ? Comme tout produit industriel, une cellule photovoltaïque est nécessairement constituée de divers matériaux dont l’extraction n’est pas neutre du point de vue environnemental et social. La production de panneaux solaires en Chine, fortement encouragée par les subventions d’État, a explosé ces dernières années et a contribué à faire baisser considérablement les prix, trop souvent au détriment des salarié-es des usines de production et de la nature. En Chine, en plus des bas salaires et des conditions de travail extrêmes, des scandales de rejets massifs dans l’atmosphère de poudre de silicium (matière première de la cellule photovoltaïque, disponible en abondance), et de pollution causée par les opérations de raffinage du silicium ont été dénoncés et documentés au cours des dix dernières années. Il est pourtant aujourd’hui possible de limiter considérablement les impacts environnementaux et de recycler les produits issus des opérations de raffinage, ce que font de plus en plus d’entreprises. Les innovations dans les techniques d’extraction et de raffinage ont permis également d’importantes améliorations. Les producteurs européens – dont les Français – ont aussi un rôle à jouer dans la prise en compte des impacts environnementaux de la filière photovoltaïque tout au long de la chaîne de production. Citons par exemple le cas de l’entreprise Voltec Solar dont les panneaux solaires produits en Alsace présentent un taux de recyclabilité proche des 100 % – une solution pour limiter les besoins de matières premières.

Les panneaux solaires, ça se recycle vraiment ? Oui, le recyclage des panneaux solaires s’est considérablement développé et doit encore être encouragé. Aujourd’hui, au terme de leur durée de vie optimale (estimée à environ 25 ans, période au cours de laquelle au moins 80 % de leur puissance initiale est garantie) les panneaux photovoltaïques, qu’ils aient été construits en Chine ou en Europe, sont recyclables entre 95 et 99 % pour la plupart des constructeurs. Des filières du recyclage des panneaux photovoltaïques s’organisent en France et en Europe, notamment depuis la création en 2007 de l’association PV Cycle qui regroupe des fabricants européens de panneaux photovoltaïques pour organiser la collecte et le recyclage. Depuis 2014, fabricants et importateurs de panneaux photovoltaïques ont pour obligation légale de reprendre gratuitement les équipements solaires en fin de vie. Et ils sont tenus de participer financièrement à la collecte et au traitement des déchets. Ces efforts non seulement limitent les besoins en matière première mais réduisent également la dépendance vis-à-vis des panneaux solaires importés de Chine.

Et les terres rares dans les panneaux solaires, alors ? Contrairement aux idées reçues, la grande majorité des panneaux photovoltaïques ne contiennent pas de « terres rares », ces groupes de métaux (utilisés notamment dans des smartphones…) dont l’extraction et le raffinage sont très polluants. La très grande majorité des panneaux solaires sont constitués de silicium cristallin, élément que l’on extrait du sable ou du quartz et qui, comme le verre, est 100 % recyclable. Ces panneaux solaires contiennent aussi des éléments en argent, en aluminium ou en cuivre et, selon les modèles, du plastique. Ils couvrent 90 % du marché du solaire. D’autres technologies photovoltaïques ont recours à des métaux rares et controversés (et non des « terres rares »), mais elles concernent moins de 10 % du marché. Des cellules de 3e génération constituées de molécules organiques sont aussi à l’étude. Dans le monde, la principale source de consommation des éléments appelés « terres rares » revient au matériel des nouvelles technologies de l’information : tablettes, smartphone, etc… On en trouve aussi dans chaque centrale à charbon, gaz ou nucléaire. Cette consommation grandissante est inquiétante car l’extraction minière de ces éléments cause de nombreux dégâts sociaux et environnementaux. Mais pour le coup, les panneaux solaires n’y sont pour rien.

Un commentaire Ajouter un commentaire

  1. aglaé dit :

    Bravo pour cette belle lettre ouverte, article de Greenpeace super intéressant , merci Dominique!

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