AFRIQUE – Protéger la vie sous toutes ses formes

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Oiseaux d’Afrique de l’Ouest capturés pour le commerce. Des études ont montré que le commerce en ligne d’oiseaux individuels peut atteindre des «nombres intolérables» et qu’une grande partie d’une population peut être touchée par ces activités commerciales. Image reproduite avec l’aimable autorisation de World Parrot Trust.

Le prochain sommet sur la biodiversité se tiendra fin décembre à Québec, sous l’égide de la Chine. En attendant, les évêques d’Afrique lancent un appel à la mobilisation pour la protection notamment du bassin du Congo

Quelques jours avant la rencontre de Nairobi, une étude publiée dans la revue Science le 3 juin 2022 révèlent que 44 % de la superficie des terres émergées de la planète, soit quelque 64 millions de kilomètres carrés, nécessitent des actions de conservation, pour arrêter le déclin de la biodiversité. « Nous devons agir rapidement, nos modèles montrent que plus de 1,3 million de kilomètres carrés de cette terre – une superficie plus grande que l’Afrique du Sud – risque d’être défriché pour les activités humaines d’ici à 2030, ce qui serait dévastateur pour la faune. », explique le Dr James R. Allan de l’Université d’Amsterdam aux Pays Bas, et directeur de l’équipe de recherche. Outre l’objectif 11 d’Aichi des Nations unies visant à protéger 17 % de la planète d’ici à 2020, les estimations de cette étude  sont de moitié, supérieures à celles envisagées dans le cadre de l’objectif 30×30. Un projet d’accord mondial pour la biodiversité, visant la conversion de 30 % de la planète en zones protégées à l’horizon 2030.

Présentée par ses auteurs comme l’une des études les plus complètes en matière de conservation, la nouvelle étude pourrait aider les décideurs à fixer des objectifs de conservation efficaces lors de la 15e conférence des Nations unies sur la biodiversité (COP15 Biodiversité), qui se tiendra finalement au Québec en décembre 2022, mais sous l’égide de la Chine, qui était prévue comme pays hôte au départ devrait se tenir fin août-début septembre 2022 à Kunming en Chine.

Du 21 au 26 juin 2022, à Nairobi (Kenya) s’est déroulé la 4e réunion du groupe de travail sur le cadre mondial pour la biodiversité post-2020. C’est dans ce cadre que l’évêque catholique Sithembele Sipuka, du diocèse sud-africain de Mthatha et premier vice-président du réseau des évêques d’Afrique et de Madagascar (SCEAM) a pris la parole sur les enjeux de la biodiversité. Une prise de parole intéressante, témoignant de la prise de conscience rapide qui opère désormais dans les milieux catholiques du continent africain face au pillage et aux dégradations rapides des écosystèmes. Extraits de son message

La nature et la biodiversité déclinent plus rapidement qu’à n’importe quel autre moment de l’histoire, et plusieurs rapports scientifiques majeurs ont mis en exergue l’ampleur massive de la perte de biodiversité. Nous savons également que le climat et la biodiversité sont inextricablement connectés à l’avenir de toute vie sur Terre.  De plus, les scientifiques sont sans appel : une économie extractiviste et non durable provoque l’urgence climatique et la crise de la biodiversité, qui détruit la Création de Dieu et qui nuit aux plus vulnérables d’entre nous, ceux qui n’ont que peu contribué à la crise, les pauvres et la Terre.

E&E : Il faut donc souligner que la prise en compte des rapports scientifiques alarmistes de ces dernières années sont désormais pris en compte, mettant en lumière un lien de plus en plus criant : le rapport entre économie extractiviste de tout genre et défis environnementaux. La suite de la déclaration reprend le constat sévère que le pape François faisait dans son encyclique Laudato si en 2015 et le consensus scientifique sur le dérèglement climatique.

(…) De même, la disparition de forêts tropicales aggrave la situation, puisqu’elles contribuent à tempérer le changement climatique.” Nous parlons ici de la vaste forêt du bassin du Congo. Il s’agit de la deuxième plus grande forêt tropicale de la planète. C’est un écosystème incroyablement riche et diversifié qui fournit de la nourriture, de l’eau douce, des abris et des médicaments à des millions de locaux et d’autochtones et qui abrite des espèces sauvages gravement menacées. Malgré tout cela, elle est menacée à plusieurs niveaux par l’activité humaine :

Accaparement des terres et agriculture industrielle / Malheureusement, ces dernières années, les investisseurs du monde entier se sont concentrés sur l’exploitation des richesses naturelles de l’Afrique, souvent au détriment des communautés locales et de l’environnement. L’ampleur de cette exploitation a entraîné la disparition d’écosystèmes vitaux. Les promoteurs internationaux de l’agriculture industrielle ont contribué à la déforestation à grande échelle et aux conflits sociaux.

Exploitation forestière illégale 
L’exploitation forestière non durable et illégale dans la forêt du bassin du Congo (par des grandes et des petites entreprises) entraîne la déforestation, la destruction de l’habitat de la faune sauvage, une diminution de la résistance à la crise climatique et des répercussions sur les communautés locales.

Conflits 
Nous assistons à une pression injustifiée sur les ressources de la Terre qui augmente les tensions et favorise les conflits. Rien que dans la forêt du Congo, des dizaines de personnes sont mortes. Il est important de noter que le biome du Congo contribue non seulement à la santé de la Terre, mais qu’il fonctionne aussi en lien avec d’autres biomes comme l’Amazonie ; le Congo contribue à l’équilibre de notre Sœur, la Terre Mère.  Nous savons que la destruction d’un quart seulement de nos terres encore inexploitées ou la pollution des océans ferait disparaître le puits de carbone indispensable qui nous permet (sans aucun coût pour la société) d’éviter les pires conséquences d’une crise climatique incontrôlée.

E&E : L’évêque sud-africain se concentre particulièrement sur le sort de la forêt du Congo, deuxième poumon de forêts tropicales sur la planète. Il en décrit les richesses, les intrications avec les autres écosystèmes mais aussi les maltraitance qu’il subit de tout part. Il espère que le voyage (NDLR : finalement annulé pour cause de problème de santé) du pape François sur place mette ce constat en lumière et reprend à son compte le cri nouveau du pape argentin :

Nous n’avons pas le droit” (LS 33) de détruire la biodiversité.

E&E : Suit une longue liste d’appels et d’exhortations aux responsables politiques et économiques, notamment des pays occidentaux pour mettre en place de vrais programmes de protection des milieux naturels de la planète. Il en profite pour demander un arrêt immédiat du projet d’oléodux de pétrole brut en Afrique de l’Est développé par Total Energie en Ouganda.

Nous rejoignons l’appel de la société civile à arrêter l’effondrement de la biodiversité et appelons les états à s’engager à protéger la moitié de la Planète, 50% d’ici 2030, afin d’éviter les pires répercussions des dangers de la crise climatique en vue de la Conférence des Nations-Unies sur la biodiversité (COP15) et de la Conférence des Nations-Unies sur les changements climatiques (COP27) plus tard cette année.

Nous exhortons les gouvernements, principalement des Pays du Nord, qui sont les principaux émetteurs de gaz à effet de serre, à remplir leurs engagements financiers. Nous leur demandons de garantir leur responsabilité et la transparence et d’aider à créer un monde sûr et résilient.

Nous appelons à la protection des droits des peuples autochtones et à leur inclusion au sein du discours sur la biodiversité et le climat. Les communautés autochtones font partie des premières à vivre les conséquences néfastes de la crise climatique à cause de leur relation étroite avec l’environnement et de leurs rôles de longue date en tant que gardiennes de la Création de Dieu. Cependant, ces communautés sont souvent mises à l’écart, parce que l’on estime qu’elles ne représentent qu’une infime partie de la population mondiale. 

Nous exigeons un arrêt immédiat du projet d’oléoduc de pétrole brut en Afrique de l’Est. Si ce dernier était construit, des communautés entières seraient déplacées, la faune sauvage serait en danger, et l’urgence climatique ainsi que la crise de la biodiversité ne feraient qu’empirer.


Aujourd’hui, nous exhortons tous nos frères et sœurs à comprendre que nous, les humains, sommes créés de manière unique à l’image et à la ressemblance de Dieu et que nous sommes appelés à exercer une gestion responsable de la Création au nom de notre Créateur aimant. C’est dans cet esprit de foi renforcé par l’enseignement de l’Église que nous implorons chacun d’entre nous de jouer un rôle à son échelle dans la protection de notre maison. Puissions-nous nous engager à grandir dans la solidarité, la communion et l’amitié.Nous prions pour que Dieu continue de bénir tous les efforts déployés pour faire de ce monde un endroit meilleur. Que Dieu bénisse les délibérations et qu’elles soient ambitieusement fructueuses.

Cette lutte pour protéger la biodiversité passe aussi par la lutte contre le trafic d’espèces protégées (et les autres). Lire cette intéressante analyse sur le trafic d’oiseaux tropicaux à titre d’exemple.

Source : Gabriel López Santamaría / Mouvement Laudato si // Afrik21 /

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