CARÊME 6/40 – Bien vivre et en harmonie : les mots clés

Le 10 février dernier, le pape recevait quarante responsables de populations autochtones à l’occasion de la sixième réunion mondiale du Forum des peuples autochtones dont le thème est « Les peuples autochtones se chargent de l’action climatique: des solutions communautaires au service de la résilience et de la biodiversité. »

« Les dangers auxquels la planète entière est confrontée se sont non seulement perpétués depuis notre dernière rencontre, en 2019, mais se sont encore aggravés à bien des égards. L’humanité continue de détruire la nature, de polluer nos rivières et de mettre le feu à nos jungles et à nos forêts », ont déclaré les dirigeants autochtones dans leur message.

C’est notamment l’industrie extractiviste qui provoque les pires dégats dans les forêts tropicales par exemple. Sites où vivent traditionnellement de nombreuses populations autochtones. Une réalité qui génère destructions, tensions et violences. Faut il rappeler qu’en 2020, plus d’un tiers des 227 militants et militantes pour le climat et l’environnement assassinés étaient issus de communautés autochtones, et près des trois quarts de ces meurtres étaient perpétrés en Amérique latine ?

Comme le rappelle Alvaro Lario, président du FIDA (Fonds international du développement agricole), les peuples autochtones sont ainsi en première ligne de la réalité des impacts de nos modes de vie et des dérèglements climatiques qu’ils induisent. En retour, ils sont aussi essentiels à la protection de la biodiversité et à la garantie d’un avenir viable sur la Terre pour les générations futures.

« Aucun agronome, aucun professionnel du développement, absolument personne ne comprendra jamais autant la nature que les peuples autochtones. Leur savoir sur la faune et la flore de notre planète, enrichi au fil des millénaires, est sans pareil », a affirmé Alvaro Lario.

Plus de 476 millions de personnes dans 90 pays se définissent comme autochtones. Et si ces hommes et ces femmes ne représentent qu’environ 6% de la population mondiale, ils constituent aussi 18% des personnes les plus pauvres de cette planète. Sept sur dix sont originaires de la région Asie et Pacifique. Les peuples autochtones contribuent à la préservation d’une part importante de la biodiversité mondiale qui s’étend sur un quart de la surface terrestre.

« Les peuples autochtones font preuve d’une énorme résilience et d’une créativité formidable en tant que chefs de file du climat et gardiens de la nature. Ils créent des pratiques et mettent en application des méthodes uniques qui sont inestimables face à la crise climatique », a ajouté Alvaro Lario.

Au cours de la rencontre avec le pape François, celui-ci a partagé cette conviction du rôle premier des peuples autochtones dans la prise de conscience et l’engagement face à la crise en cours. Il rajoute dans son discours

 Aujourd’hui, plus que jamais, nombreux sont ceux qui appellent à un processus de reconversion des structures de pouvoir établies qui régissent la société, dans la culture occidentale; ils transforment en même temps les relations historiques marquées par le colonialisme, l’exclusion et la discrimination, donnant lieu à un dialogue renouvelé sur la manière dont nous construisons notre avenir sur la planète. Il est urgent de mener des actions communes, fruit d’une collaboration loyale et constante, car le défi environnemental que nous vivons et ses racines humaines ont un impact sur chacun d’entre nous. Un impact non seulement physique, mais aussi psychologique et culturel.  C’est pourquoi je demande aux gouvernements de reconnaître les peuples autochtones du monde entier, avec leurs cultures, leurs langues, leurs traditions, leur spiritualité, et de respecter leur dignité et leurs droits, dans la conscience que la richesse de notre grande famille humaine réside précisément dans sa diversité. (…)

Ignorer les communautés originelles dans la préservation de la terre est une grave erreur — c’est du fonctionnalisme extractif — sans parler d’une grande injustice. Au contraire, la valorisation de leur patrimoine culturel et de leurs techniques ancestrales permettra de s’engager sur des chemins vers une meilleure gestion de l’environnement.

Puis il redonne deux points importants qu’il a déjà souligné à maintes reprises : la notion du buen vivir (le bien vivre) et d’harmonie..

Le bien vivre n’est pas le «dolce far niente», la «dolce vita», de la bourgeoisie «distillée», non, non. C’est vivre en harmonie avec la nature, en sachant rechercher non pas l’équilibre, non, plus que l’équilibre, l’harmonie, qui est supérieure à l’équilibre. L’équilibre peut être fonctionnel, l’harmonie n’est jamais fonctionnelle, elle est souveraine en soi. Savoir se mouvoir en harmonie: c’est ce qui donne la sagesse que l’on appelle le bien vivre. L’harmonie entre une personne et sa communauté, l’harmonie entre une personne et l’environnement, l’harmonie entre une personne et l’ensemble de la création.Les blessures contre cette harmonie sont celles que nous voyons clairement détruire les peuples: l’extractivisme, dans le cas de l’Amazonie, par exemple, la déforestation, ou dans d’autres endroits l’extractivisme de l’industrie minière. Il faut alors toujours rechercher l’harmonie. Quand les peuples ne respectent pas le bien du sol, le bien de l’environnement, le bien du temps, le bien de la végétation ou le bien de la faune, ce bien général, quand ils ne le respectent pas, ils tombent dans des attitudes non humaines, parce qu’ils perdent le contact avec, je dis le mot, la terre-mère. Pas dans un sens superstitieux, mais dans le sens où la culture nous donne cette harmonie. Les cultures aborigènes ne sont pas là pour être transformées en une culture moderne, non. Elles sont là pour être respectées. [Nous devons envisager] deux choses: premièrement, les laisser poursuivre leur chemin de développement et, deuxièmement, écouter les messages de sagesse qu’elles nous transmettent. Car c’est une sagesse qui n’est pas encyclopédique. C’est la sagesse de voir, d’écouter et de toutcher la vie quotidienne. Continuez à vous battre pour proclamer cette harmonie, car cette politique fonctionnaliste, cette politique d’extractivisme est en train de la détruire. Et que nous puissions tous apprendre du bien vivre dans ce sens harmonieux des peuples autochtones.  

Source : Fida

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