NATURE – Quand le cosmos se fait désirer

Je crois que le blog E&E n’a fait qu’évoquer rapidement, il y a quelques mois, la publication du livre de Jean-Claude Eslin  « Face au défi écologique, articuler désir et limite »

Dans un article d’Elodie Maurot, il y a un an, à La Croix, le philosophe expliquait son travail et sa réflexion. Extraits :

Jean-Claude Eslin :  Aujourd’hui, nous, chrétiens, concevons et aimons des hommes abstraits de leur environnement cosmique. C’est insuffisant. Nous devons repenser notre lien à la nature, entendue à la fois comme nature autour de nous, hors de nous et en nous. Aujourd’hui, le christianisme est obligé de redéfinir ce qu’est l’homme dans la nature, ce qu’il n’a jamais eu vraiment l’occasion de faire depuis ses origines.

(…) Les anciens se percevaient comme dans la nature et cherchaient des accommodements, des compromis, avec elle. On le voit chez les stoïciens, qui s’efforcent de vivre selon la nature. Le monde chrétien a vécu sur cet héritage de l’Antiquité jusqu’au XIIe siècle, sans grande originalité. Les moines du XIIe siècle, comme ceux de Cîteaux, reprenaient encore des expressions stoïciennes comme « Marche selon la nature ». Par la suite, le christianisme a perdu l’héritage antique. L’homme occidental, compris comme volonté, est devenu un être abstrait, dépouillé de la nature. Pourtant, Thomas a eu l’audace de construire une théologie à partir d’Aristote, c’est-à-dire à partir d’une philosophie naturaliste. Mais très vite, sa lecture a été biaisée par l’insistance sur la loi naturelle et la distinction entre naturel et surnaturel. On peut donc considérer que la théologie de la nature de Thomas d’Aquin n’a pas eu sa chance. Pour sortir du néothomisme, le concile Vatican II a renoncé à employer le mot de surnaturel. Il a bien senti la nécessité d’adopter un nouveau langage. Mais un concile ne peut qu’indiquer un changement de cap, un nouvel angle d’attaque. Il ne lui revient pas d’élaborer une pensée nouvelle.

(…) Il faut associer désir et limite, comme l’ont fait de manière très différente Augustin et Thomas d’Aquin. Chez eux, le désir a une place capitale. Si on est habité par cette philosophie du désir, la limite devient recevable. En ce sens, la nouvelle revue du Cerf « Nos limites » ne pose pas les choses de manière très satisfaisante à mes yeux. Le philosophe Paul Ricœur a bien remarqué que le premier mouvement de l’homme n’est pas la conscience de la finitude, mais plutôt le désir, l’illimité… Pour un homme occidental, pour tout homme à vrai dire, la conscience de la finitude sera un résultat, non pas un point de départ.

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