Le travail de clarification de la mémoire historique de l’Eglise catholique se poursuit. Une note récente, publiée par les dicastères de la culture et celle du développement humain intégral, vient faire la lumière sur une doctrine ancienne qui avait justifié par moment la colonisation de terres dites vierges. Une doctrine désormais rejetée.
Les bulles papales du XVe siècle qui réagissaient à l’expansion coloniale inédite de royaumes européens vers l’Afrique, l’Asie et les Amériques, tentaient de tracer une ligne directrice spirituelle dans cette aventure.
Mais les pressions économiques et politiques étaient telles que bien souvent, ces bulles ne faisaient qu’accompagner pour ne pas dire légitimer des pratiques désormais clairement condamnables. A l’époque déjà, la question du respect du aux populations autochtones était débattu.
On connait la suite de l’histoire qui hélas montre que les invitations à la modération et au respect n’ont pas été entendue ou suivie. Pire, elles ont laissé place à des propos justifiant l’appropriation illégale de ces terres.
Ce sont aussi les affaires récentes concernant la maltraitance organisée dans les institutions scolaires, par exemple, au Canada, des enfants issues des populations autochtones qui ont poussé à clarifier ce sujet. «L’Église a acquis une plus grande conscience de leurs souffrances, passées et présentes, dues à l’expropriation de leurs terres… ainsi qu’aux politiques d’assimilation forcée, promues par les autorités gouvernementales de l’époque, destinées à éliminer leurs cultures autochtones», souligne cette notre commune sur cette doctrine dite de la « découverte ». Une théorie pseudo-théologique qui justifiait, de fait, l’expropriation et les autres formes de violences que la colonisation provoquait. La note est claire : cette doctrine de la découverte «ne fait pas partie de l’enseignement de l’Église catholique». Autrement dit, les bulles papales de l’époque étaient purement politiques et n’exprimaient pas le coeur de la foi chrétienne. Il faut dire aussi que si certains chrétiens ont justifié la violence des colonisateurs, d’autres ont résisté, défendant les populations locales, leurs cultures et leurs héritages.
Cette doctrine de la découverte est une claire violation du droit de propriété, nié à ces populations locales.
En ce qui concerne la « doctrine de la découverte« , le texte indique que «le concept juridique de “découverte” a été débattu par les puissances coloniales à partir du XVIe siècle et a trouvé une expression particulière dans la jurisprudence du XIXe siècle des tribunaux de plusieurs pays, selon laquelle la découverte de terres par des colons conférait un droit exclusif d’éteindre, par achat ou conquête, le titre ou la possession de ces terres par les peuples autochtones». Selon certains chercheurs, cette « doctrine » s’appuie sur plusieurs documents pontificaux, notamment les bulles de Nicolas V Dum Diversas (1452) et Romanus Pontifex (1455), et celle d’Alexandre VI Inter Caetera (1493). Il s’agit d’actes par lesquels ces deux Papes ont autorisé les souverains portugais et espagnols à s’approprier les terres colonisées en soumettant les populations d’origine.«La recherche historique démontre clairement que les documents pontificaux en question, rédigés à une période historique spécifique et liés à des questions politiques, n’ont jamais été considérés comme des expressions de la foi catholique», poursuit la note. En même temps, l’Église «reconnaît que ces bulles pontificales n’ont pas reflété de manière adéquate l’égale dignité et les droits des peuples autochtones». Elle ajoute que «le contenu de ces documents a été manipulé à des fins politiques par des puissances coloniales concurrentes afin de justifier des actes immoraux» à l’encontre des peuples autochtones «qui ont été réalisés parfois sans que les autorités ecclésiastiques ne s’y opposent». Il est donc juste, affirment les deux dicastères du Saint-Siège, «de reconnaître ces erreurs, de reconnaître les terribles effets des politiques d’assimilation et la douleur éprouvée» par les peuples autochtones, «et de demander pardon».Le Pape François est ensuite cité: «que la communauté chrétienne ne se laisse plus jamais contaminer par l’idée qu’il existe une supériorité d’une culture par rapport à une autre et qu’il est légitime d’utiliser des moyens de coercition sur les autres». Il est également rappelé que le magistère de l’Église défend le respect dû à tout être humain et que l’Église «rejette donc les concepts qui ne reconnaissent pas les droits humains inhérents aux peuples autochtones», y compris la soi-disant « doctrine de la découverte« . Enfin, la note cite les déclarations «nombreuses et répétées» de l’Église et des Papes en faveur des droits des peuples autochtones, à commencer par celle contenue dans la bulle Sublimis Deus de Paul III (1537), qui a déclaré solennellement que les peuples autochtones ne devaient «en aucun cas être privés de leur liberté ou de la possession de leurs biens, même s’ils ne sont pas de foi chrétienne ; et qu’ils peuvent et doivent, librement et légitimement, jouir de leur liberté et de la possession de leurs biens ; ils ne doivent en aucun cas être réduits en esclavage; si le contraire se produit, cela sera nul et sans effet». Plus récemment, la solidarité de l’Église avec les peuples autochtones s’est traduite par «un fort soutien du Saint-Siège aux principes contenus dans la Déclaration des Nations Unies sur les Droits des Peuples autochtones». Leur mise en œuvre «améliorerait les conditions de vie et contribuerait à protéger» les droits de ces peuples.